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[Coronavirus data projection #2] Les nouvelles du front en date du 05 avril 2020

Ce billet fait partie d’une série d’analyses prédictives de Bengs qui s’appuient sur les données de l’OMS. Les contraintes de modélisation complètes sont détaillées ici

Pour cette mise à jour en date du 5 avril 2020, les nouvelles du front ne sont pas très bonnes pour tout le monde.

Ca monte, ça monte…

Un petit coup d’œil à nos courbes exponentielles pour ne pas perdre nos repères, et l’on voit que ça monte partout, avec une pente très impressionnante pour les Etats-Unis qui ont dépassé les 300 000 cas.

Fig. 1: Graphique du total de cas positifs en fonction du nombre de jours depuis le dixième décès de Italie, France, Allemagne, Suisse, UK, USA et Espagne

Mais ce genre de tracé ne nous permet pas d’apprécier la situation. Il faut pour cela avoir recours plutôt à des tracés en double échelle logarithmique.

L’Italie et l’Espagne confirment qu’elles sont en bonne voie, un répit pour la France, l’Allemagne à surveiller et les USA toujours sur une trajectoire vertigineuse

Fig. 2: Graphique en double échelle logarithmique de Italie, France, Allemagne, Suisse, UK, USA et Espagne

Comme nous l’avions remarqué en milieu de semaine, l’Italie confirme le redressement de la situation (même la petite remontée de ce dimanche ne ramène pas la courbe sur la transversale). L’Espagne, la France et la Suisse montrent une amorce de maitrise de l’épidémie, qui se confirme de jour en jour.

Pour l’Allemagne par contre, on note une remontée assez forte la ramenant sur la trajectoire initiale. Nous verrons dans les jours à venir si cette tendance se confirme.

Malheureusement, pour les États-Unis, la tendance très mauvaise se confirme, sans aucun signe d’amélioration. Depuis près d’une semaine, aucune inflexion ne se manifeste.

Qu’en est-il de la dangerosité de Covid-sars-2 ?

Sur le front des décès, la situation est également contrastée. Le nombre de décès traduit d’une part la mortalité intrinsèque de la maladie Covid-19, mais aussi la qualité et la capacité du systèmes de santé local.

 

Fig. 3: Graphique des décès journaliers pour Italie, France, Allemagne, Suisse, UK, USA et Espagne en fonction du nombre de jours depuis le 10ème décès. Filtrage Savitzky-Golay

 

On constate clairement la baisse en Italie et en Espagne. Par contre, en France, en Angleterre et aux USA, c’est une croissance vertigineuse. Le taux de croissance particulièrement élevé pour la France résulte d’une intégration depuis samedi des décès en EPHAD, et donc une évolution du mode de comptage. Ce qui pèse sur la tendance calculée.

L’analyse du jour : comment la politique de comptage influence la mesure de la « mortalité » de la maladie

Sur ce graphique qui représente le nombre total de décès rapporté au nombre total de cas de contamination, on remarque clairement deux trajectoires très différentes. Ce ratio, en théorie, représente la mortalité de la maladie. Pour un nombre donné de cas d’infections par Covid-SARS-2, le nombre de décès est relativement constant et traduit ce que l’on appelle mortalité.

Fig. 4: Graphique du nombre total de décès en fonction du nombre total de cas testé positifs au Covid-SARS-2 pour Italie, France, Allemagne, Suisse, Etats-Unis, UK et Espagne.

 

On peut également observer l’évolution de la mortalité en fonction du nombre de jours écoulés depuis le 10ème décès enregistré.

Fig. 5: évolution de la mortalité (nombre total de décès divisé par le nombre total de cas positifs) en fonction du nombre de jours écoulés depuis le 10ème décès pour Italie, France, Allemagne, Suisse, Etats-Unis, UK et Espagne

 

On retrouve bien nos deux cohortes. La maladie ayant les mêmes effets sur tous les humains, on ne peut expliquer qu’elle tue entre 1,5% et 3,3% environ des Allemands, des Américains et des Suisses atteints, alors qu’elle en tue plus de 10% dans les autres pays de notre échantillon.

Fig. 6: tableau des pays de notre échantillon classés par ordre décroissant de leur taux de mortalité.

 

Comme il s’agit d’un ratio, les valeurs du numérateur et du dénominateur sont clés. Bien entendu, la mortalité ainsi calculée dépend beaucoup des chiffres concernant les cas positifs. Un pays qui effectue des tests systématiques (comme l’Allemagne) voit le nombre de cas positifs augmenter, ce qui fait mécaniquement baisser la mortalité.

Mais il n’y a pas que le dénominateur qui dépend de la politique du pays. Le compte des décès n’est pas effectué de la même manière dans tous ces pays. En France, en Italie et en Espagne, des tests post-mortem sont effectués et toute personne décédée qui est testée positive est considérée comme victime de COVID-19, même si un état pathologique préexistait. En revanche, en Allemagne, il n’y a pas de test post-mortem de la présence de covid-sars-2. Donc si la personne était malade d’autre chose, même si elle est porteuse de covid-sars-2, elle n’en est pas comptabilisée comme une victime.

Mais l’on constate surtout que la mortalité augmente, sans se stabiliser pour tous ces pays, sans exception. Cela veut dire que le temps n’a pas encore été suffisant pour que, quelle que soit la politique de comptage retenue, ce taux se stabilise. En effet, les personnes atteintes de la variante grave de la maladie ne décèdent pas immédiatement. Elles sont placées en réanimation pour tenter de les sauver et cela peut durer plusieurs semaines car les soins prodigués dans ces unités spécialisées peuvent maintenir en vie des cas extrêmement grave pendant parfois des semaines.

Malgré la polémique sur ses chiffres (de décès), la Chine donne une référence

Un pays a suffisamment de recul, c’est la Chine. Alors, à quel taux s’est établi la mortalité en Chine?

Fig. 7: évolution de la mortalité (nombre total de décès divisé par le nombre total de cas positifs) en fonction du nombre de jours écoulés depuis le 10ème décès pour Italie, France, Allemagne, Suisse, Etats-Unis, UK, Espagne et Chine.

 

On voit clairement sur ce graphique trois choses:

  • une courbe qui évolue entre 2 et 4%,
  • une asymptote très claire à 4%
  • et enfin une durée de stabilisation de près de 50 jours après le dixième décès.

On note, et il faudra surveiller cela dans les jours qui viennent, que l’Italie et l’Espagne semblent amorcer une inflexion vers une asymptote, beaucoup plus élevée que 4%. Ce qui n’est pas le cas de UK et de la France qui semblent se diriger vers des valeurs beaucoup plus élevées.

L’Allemagne est les États-Unis suivent une courbe qui semble étonnamment similaires, et proche de celle de la Chine. Les Chinois comptent t’ils de la même manière que les Allemands et les Américains ? Si c’est le cas, le taux de mortalité aux USA va s’établir à 4%. D’où l’enjeu de maitriser les contaminations car avec plus de 300 000 cas recensés, c’est déjà 14 000 morts. A 500 000 cas, c’est 20 000 morts. Or, l’épidémie semble loin d’être sous contrôle aux USA. Et si l’on monte à plusieurs millions de cas…

Peut-on entrevoir là où le taux de mortalité de Covid-19 va s’établir en Italie et en Espagne?

Pour essayer d’établir les taux de mortalité auxquels vont aboutir les différents pays, on peut tenter une extrapolation polynomiale de la courbe de mortalité. Ce calcul, purement mathématique ne traduit pas les efforts que fournissent chaque jour le corps médical pour sauver des vies, mais après la mise en place des mesures qui stabilisent les contaminations en Italie et en Espagne, on peut penser que l’on commence à avoir établi un régime stabilisé qui suit de fait une loi mathématique (comme toute épidémie).

  Fig. 8: Courbes d’évolution de la mortalité pour Italie et Espagne (avec référence Chine) en fonction du nombre de jours après le 10ème décès, extrapolation polynomiale de 10 jours.

Les taux en Espagne et en Italie semblent devoir s’établir à 10% et 13% respectivement. On ne doit pas oublier qu’ils dépendent fortement de la manière de compter les cas de contamination et les décès. Il est de fait compliqué, voire inutile, de les comparer entre eux. Néanmoins, ils permettent d’établir un bilan potentiel du nombre des victimes en projetant le nombre total de cas de contamination qui suit, lui aussi, une loi très mathématique.

Nous allons surveiller tout cela dans les jours et semaines qui viennent pour voir comment la situation évolue et si ces prévisions sont exactes.

Les pays à surveiller dans les semaines qui viennent

Voici un Top 15 des pays dont le taux de nouvelles contaminations journalier est le plus élevé (extrapolation linéaire sur les 3 derniers jours).

Fig. 9: Top 15 des pays aux taux de croissance du nombre de nouveaux cas de contamination les plus élevés (au 05/05/2020)

Il va falloir surveiller des pays comme la Turquie ou les Pays Bas qui rentrent dans ce top 15.