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Les 5 clés du redémarrage réussi – Penser le redémarrage au-delà des frontières de son entreprise [Chapitre 2]

En tant que cabinet de conseil en stratégie et innovation auprès de grands décideurs corporate, nous échangeons avec nos clients depuis le début de la crise économique liée au Covid19 sur les feuilles de route de redémarrage des COMEX.

Dans une série de 5 billets successifs nous souhaitons partager avec vous ici notre vision des clés du redémarrage réussi issue de l’analyse de ces feuilles de route stratégiques.

  1. Savoir d’où l’on part
  2. Penser le redémarrage au-delà des frontières de son entreprise
  3. Ne pas considérer que tout va changer ou que tout sera comme avant
  4. Prendre en compte les impacts psychologiques du confinement
  5. Intégrer un nouveau référentiel de prise de décision

Nous vous invitons également à partager cette analyse lors d’un webinar qui se tiendra le 5 mai prochain de 10h à 11h.

Chapitre 2:  Penser le redémarrage au-delà des frontières de son entreprise

Chaque entreprise a subi des impacts différents selon plusieurs paramètres comme en premier lieu la nature de son activité, sa capacité à s’organiser rapidement, ses décisions stratégiques de maintien de flux vitaux d’activité, sa maturité digitale pour favoriser le travail à distance lorsqu’il est possible. Nous avons développé ces éléments dans le Chapitre 1.

Si aux prémices du déconfinement, les entreprises ne sont pas sur la même ligne de départ et certaines accusent un retard difficile à combler, comment trouver des solutions collectives pour relancer les filières économiques ?

La mise en lumière des extrêmes imbrications des filières économiques

La crise du COVID-19 est devenu « un formidable » terrain d’observation pour les dirigeants d’entreprises. Si aujourd’hui, le système économique actuel est imbriqué entre une usine planétaire (la Chine) et des consommateurs de par le monde, les filières économiques ont été créées en diversification amont et aval pour intégrer l’ensemble de la supply chain jusqu’à la transformation du produit en service et en réunissant des industries différentes avec des métiers par filière. Par exemple, la filière de la mobilité va des divers fournisseurs de matière première (acier, fer, caoutchouc, terres rares…) aux fabricants des pièces détachées, puis aux constructeurs automobiles et en bout de chaîne au service de VTC. Il suffit qu’un acteur de la filière soit impacté par la crise pour que ceux en amont le soient, car leurs carnets de commandes partent à la baisse ou à la hausse en fonction de l’activité de leurs clients et leur distribution peut être bouleversée en bout de chaine. Il en suffit d’un seul également pour que les acteurs en aval subissent des impacts, car il peut avoir plus de difficultés à se fournir.

Le dynamisme de nouveaux services en bout de chaîne modifie régulièrement les enjeux des filières. Par exemple la logistique a dû s’adapter à l’augmentation du e-commerce et des livraisons à domicile pour booster sa capacité à gérer le dernier kilomètre. La mobilité ne s’arrête plus au schéma classique de vente d’une voiture à un propriétaire particulier ou privé, mais aussi à la vente d’une voiture destinée à opérer un service de véhicule partagé ou de VTC. L’industrie en général est tiraillée entre la nécessaire standardisation des gammes de production pour optimiser son excellence opérationnelle, et l’injonction à l’hyperpersonnalisation des services et produits en bout de chaîne (pour en savoir plus, le Bengs Lab a travaillé sur les business model de l’hyperpersonnalisation).

Ainsi les filières sont plus que jamais imbriquées et la crise ne fait que mettre davantage en lumière leurs liens étroits.

Les impacts sur les entreprises sont liées aux impacts sur les autres acteurs de leur filière

Pour les COMEX aujourd’hui, prendre toute la mesure de la notion de filière est une première clé d’analyse pour mesurer les impacts et imaginer la redynamisation des activités . Avec le confinement, et des impacts très différentiés d’un pays à un autre lorsque l’on exerce une activité mondialisée, il s’agit de prendre conscience que cette nouvelle organisation du travail imposée est d’autant plus efficiente que les actions ciblées seront réalisées par filière et par métiers. La coopération n’en sera que plus qu’indispensable (coopération entre secteurs d’activités pour faire émerger les filières et les métiers des filières). Si chaque entreprise de la chaîne n’est pas impactée de la même manière d’abord sur le ralentissement plus ou moins grand de son volume d’activité, mais aussi et surtout sur le fait des comportements d’un autre acteur de la filière, elle ne l’est pas non plus par rapport à ses filiales à l’étranger qui peuvent adopter des modes de confinement différents.

Pour illustration, La Fondation Robert Schuman a résumé les différentes mesures de confinement prises par les Etats européens.

Il est intéressant de souligner que la principale cause de diminution d’activité des entreprises, selon un rapport « Activité et conditions d’emploi de la main-d’œuvre pendant la crise sanitaire Covid-19 » de la DARES, est en très grande majorité (85%) due à la « perte de débouchés, des fermetures administratives, ou des difficultés d’approvisionnement » et beaucoup moins (15%) à « un manque de personnel pouvant travailler »*. C’est donc bel et bien en lien avec son écosystème de filière en amont (difficultés d’approvisionnement) et en aval (perte de débouchés) qu’une entreprise est touchée. Si un secteur comme la fabrication de matériel de transports a vu son activité diminuer très fortement ou être arrêté à hauteur de 92%, ce n’est pas tant à cause de difficultés à organiser ses usines pour maintenir un niveau de production minimal en respectant la sécurité des travailleurs, que des effets conjugués de la difficulté d’approvisionnement en amont et de l’arrêt de l’activité de des opérateurs de transports en aval. On aurait pu imaginer qu’une entreprise prise isolément en profite pour travailler sur des projets (par exemple à l’optimisation de sa chaîne de production), continue à produire un peu pour constituer un stock de produits raisonnable, mais l’imbrication économique avec sa filière rend ce scénario trop coûteux et risqué.

*Source : Dares, enquête Acemo Covid, avril 2020

Penser son activité au travers de la filière et non plus des secteurs et métiers

Une vision autocentrée ne rimerait à rien pour les dirigeants d’entreprises, quel est l’intérêt de maintenir une activité même partielle, si les autres de la même filière ne le font pas ? Même si les stocks peuvent permettre à une activité de continuer avec un réapprovisionnement réduit pendant quelques semaines, une perturbation en amont ou en aval de la filière ne manque pas d’impacter sa propre activité au bout d’un certain temps.

Nous défendons au contraire une vision par filière et non pas par secteur d’industrie. Pour minimiser l’impact, la clé de la reprise est l’adoption d’actions publiques et d’actions de solidarité par filière et non pas par secteur (aider un seul des acteurs d’une filière ne sert à rien), là finalement où la création de valeur sera la plus élevée. Ainsi, l’exemple des 240 milliards de l’UE accordés sous la forme de prêts exclusivement à la filière santé illustre ce point. La prochaine étape pour un redémarrage réussi serait de poursuivre et structurer des mesures de soutien filière par filière, en activant des nouvelles formes de coopération et de solidarité entre acteurs d’une même filière, et en orientant les mesures d’aide sur les acteurs clés de la chaîne pour favoriser la relance (par exemple le fournisseur en début de chaîne duquel dépendent les acteurs en aval).

Intégrer l’acteur public dans son référentiel de prise de décision

De nombreuses mesures d’urgence ont été prises par les acteurs publics dans le monde pour aider l’économie à absorber au mieux l’impact économique. Etats, Banques Centrales on institutions supra-étatiques comme les institutions européennes ont multiplié les mesures de subventions, financement, directes et indirectes, au service des entreprises.
Comme l’illustrent ces tableaux de la Fondation Robert Schuman, les mesures de relance à l’échelle européenne et prises par les différents Etats Membres sont nombreuses et sans cesse renforcées depuis le début de la crise pour soutenir les entreprises.

L’interventionnisme de l’Etat dans les économies libérales en période de crise n’est pas nouveau. Son rôle s’est affirmé au cours des différentes crises économiques qu’a traversé le capitalisme libéral, de la crise boursière de 1929 à la crise de la dette dans la zone euro (2010-2013) en passant par le krach boursier de 2001-2002 et la crise financière de 2008. Les mesures de soutien aux grandes entreprises et notamment aux banques et institutions financières ont été légion. Si la crise actuelle voit la mise en place de mesures de soutien similaires, l’interventionnisme public ne semble-t-il pas aller plus loin ? Les acteurs publics aident les petites entreprises et les entrepreneurs indépendants durement impactées autant, sinon plus, que les grands groupes qui ont des réserves financières leur permettant d’absorber plus longtemps une diminution de revenus et qui ne sont pas touchés dans leur mode de financement comme lors des crises financières précédemment citées. Les liaisons économiques entre des entreprises et des acteur publics ne sont plus réservées aux grandes entreprises « Too big to fail ».

Au-delà des mesures ponctuelles, on observe également une volonté des acteurs publics d’intervenir durablement dans la création de capacités financières nouvelles pour les entreprises. Bien qu’avec prudence, l’Etat français ne manque pas de parler de nationalisations et propose de « protège[r], pour une durée limitée, des entreprises en prenant une participation ou éventuellement en faisant une nationalisation temporaire » (Bruno Le Maire, ministre de l’Economie et des Finances, France 24 et RFI, 3 avril 2020). Au sujet de la production industrielle de l’industrie pharmaceutique, une réindustrialisation durable de la production de médicament en France sera un sujet prioritaire de l’Etat (en parlant de l’industrie pharmaceutique, « Nous aurons l’occasion de revenir sur la question essentielle de la réindustrialisation », Olivier Véran, ministre des Solidarités et de la Santé, Assemblée nationale, 31 mars 2020).

La mise en lumière des forts liens de dépendance à la production importée de l’étranger sur des filières entière encourage les acteurs publics à prendre de véritables mesures des sujets de réindustrialisation et de relocalisation du tissu productif national, d’autant plus que ces idées sont dans l’air du temps depuis quelques années et se renforcent dans l’opinion publique (notamment pour des questions de réduction des émissions de carbone due au fret).

Dans leur stratégie de redémarrage, les entreprises devront donc prendre en compte, en plus des acteurs de leur filière, les acteurs publics dans leurs référentiels de prise de décision. La volonté interventionniste des pouvoirs publics qui est amenée à durer post-crise et leur capacité à financer et à légiférer en font des agents clés d’un redémarrage durable.

Les filières évoluent ensemble, au gré des innovations et de l’activité de chaque acteur de la chaîne

Comment bien comprendre les imbrications de votre entreprise avec les acteurs de votre (ou de vos) filière(s) ? Que faire pour organiser le redémarrage par filière ? Comment intégrer l’acteur public dans sa stratégie de demain ?Quelles opportunités d’innovation et d’excellence opérationnelle peut-on mettre en place pour non seulement organiser le redémarrage mais devenir plus performants qu’avant la crise ?

Suivez notre actualité et rejoignez nous le 5 mai 2020 de 10h à 11h pour un webinar dédié à ce sujet!